L'au-delà
Je me lève et je marche et je sens sous mes pas,
Au sortir de la mort, mon réveil et ma sève
Que mon échine en tremble; et je chasse un vieux rêve
Au bout de cette nuit qui n'en finissait pas.
Il y avait un pas et puis un autre pas;
Il y avait un jour et puis un autre jour.
J'aimais à croire ainsi qu'il en serait toujours.
Les jours entre eux pourtant ne se ressemblent pas.
J'ai laissé mes amours en vacance à Venise.
Elles passent sans moi sous le Pont des Soupirs;
La ville étend sur elles à nouveau son empire.
J'y retournerai, seul, défaire sa mainmise.
J'irai humer la mer, marcher le long des quais
Et braver la marée humaine en solitaire,
Forcer encore en moi une plainte à se taire
Et fermer le canal lacrymal d'un hoquet.
Les palais n'auront plus à leur fronton superbe
Que l'immanquable oubli des couleurs qui s'effacent.
Et de vieux souvenirs y referont surface :
Ces reflets du passé que Venise exacerbe.
Je serai triste et sot, et pire encore : blême.
J'aurai perdu le nord. Je chercherai la lune.
Et lorsque je croirai la voir dans la lagune
Je m'entendrai lui dire en silence : je l'aime.
Je sais que je verrai alors sortir des eaux
Une forme nouvelle, un corps nu de sirène
Qui aura mon royaume et en sera la reine
Quand le temps aura mis de la chair sur mes os.
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